Après 200+ audits de contrats d'infogérance à Paris, je peux vous dire une chose : le prix affiché ne veut strictement rien dire. Ce qui compte, c'est ce qu'il y a derrière. Et les facteurs de variation, personne ne prend le temps de vous les expliquer. Normal : ça permettrait de comparer intelligemment.
La taille de votre entreprise : le facteur n°1
C'est logique, mais pas pour les raisons qu'on vous donne. Un prestataire qui gère 10 postes a les mêmes coûts fixes qu'un qui en gère 50 : supervision, hotline, astreintes. La différence ? Il les amortit moins bien.
Constat terrain : sur mes audits, les PME de 10-15 postes payent en moyenne 30% plus cher par poste que celles de 40-50. Pas parce qu'elles sont arnaquées — parce que les coûts fixes sont incompressibles.
Mais attention. Certains prestataires surfacturent les petites structures sous prétexte de "complexité de gestion". Bullshit. Si votre infra est simple (un serveur, des postes standards, Microsoft 365), il n'y a aucune raison de payer 150€/poste.
Votre secteur d'activité : le multiplicateur caché
Un cabinet médical et une agence de com n'ont pas les mêmes contraintes IT. Le médecin doit être conforme HDS (Hébergement Données de Santé), le développeur web a besoin de VM puissantes et de déploiements continus. Le notaire a des obligations de conservation sur 75 ans.
Voici ce que je vois passer régulièrement :
- Professions réglementées (avocats, médecins, notaires) : +20 à 40% sur le prix de base. Conformité, chiffrement, audit trail obligatoire.
- Agences/startups tech : +10 à 25%. Environnements hétérogènes (Mac + PC + Linux), outils spécifiques, besoin de réactivité.
- Commerce/retail : coût standard, sauf si caisses connectées ou multi-sites.
- Bureaux tertiaires classiques : prix plancher, infra simple, rien de spécifique.
J'ai vu un cabinet d'avocats du 8ème payer le même prix qu'une agence de pub du 11ème. Sauf que l'avocat avait besoin de conformité RGPD renforcée, de sauvegardes chiffrées, et d'un accès sécurisé pour les dossiers clients. Le prestataire avait juste oublié de le prévoir. Résultat : contrôle CNIL, panique, refonte complète du contrat. Qui a payé ? Le client, évidemment.
La complexité de votre infrastructure
C'est le facteur le plus logique, et pourtant le plus mal évalué par les commerciaux. Parce qu'un audit d'infra sérieux prend du temps. Et le temps, c'est de l'argent qu'ils préfèrent économiser.
Les éléments qui font grimper la note :
Facteurs de complexité technique
- → Multi-sites : chaque site = liaison à sécuriser, matériel à superviser, VPN à maintenir
- → Serveurs on-premise vs cloud : un serveur physique demande plus de maintenance qu'un Azure/AWS bien configuré
- → Applications métier spécifiques : logiciels comptables, ERP, CRM custom = temps de formation et support dédié
- → Parc hétérogène : Mac + PC + tablettes + téléphones = multiplication des compétences
- → Télétravail généralisé : VPN, sécurité endpoint, support à distance renforcé
Un truc que je répète à chaque audit : faites faire un inventaire technique AVANT de demander des devis. Un prestataire sérieux le fera gratuitement (il en a besoin pour chiffrer). Un prestataire moyen vous donnera un prix "au doigt mouillé" et rattrapera la marge sur les avenants.
Le niveau de SLA demandé
Le SLA (Service Level Agreement), c'est la promesse de réactivité. Et ça coûte cher. Très cher si vous voulez du premium.
| Niveau SLA | GTI/GTR | Impact prix |
|---|---|---|
| Standard | GTI 4h / GTR 8h ouvrées | Prix de base |
| Business | GTI 2h / GTR 4h ouvrées | +15 à 25% |
| Premium | GTI 1h / GTR 4h 24/7 | +40 à 60% |
| Critique | GTI 15min / GTR 2h 24/7 | +80 à 120% |
La vraie question : avez-vous BESOIN d'un SLA premium ? Une agence de com qui bosse en 9h-18h ? Non. Un cabinet médical avec des urgences ? Peut-être. Un site e-commerce avec 100K€ de CA/jour ? Oui.
Mon conseil
Négociez un SLA différencié : standard pour le support bureautique, premium pour les serveurs critiques. Vous économiserez 20-30% par rapport à un premium global.
Les options "oubliées" qui font exploser la facture
Le prix de base, c'est rarement le prix final. Et c'est là que les mauvais prestataires se rattrapent.
Ce qui est souvent facturé en plus (alors que ça devrait être inclus) :
- Déplacements sur site : certains facturent 150-200€ la moindre intervention physique
- Ajout/suppression d'utilisateur : 50-100€ par mouvement. Sur un an, ça chiffre.
- Mises à jour majeures : Windows 11, migration Office 365, nouveaux serveurs
- Tests de restauration : certains ne les font jamais, d'autres facturent chaque test
- Heures hors forfait : le forfait "illimité" qui ne l'est jamais vraiment
Posez la question cash : "Qu'est-ce qui n'est PAS inclus dans ce prix ?" Si le commercial hésite, c'est mauvais signe.
La localisation : le facteur Paris
Oui, être à Paris coûte plus cher. Les loyers des prestataires sont plus élevés, les techniciens aussi. Mais il y a des nuances.
Ce que j'observe :
- → Prestataire intra-muros : +10-15% par rapport à la banlieue, mais intervention rapide
- → Prestataire proche banlieue (92, 93, 94) : bon compromis prix/réactivité
- → Prestataire grande banlieue : moins cher, mais temps d'intervention plus long si urgence physique
Si tout votre support peut se faire à distance (infra cloud, postes modernes), la localisation importe peu. Si vous avez besoin d'interventions physiques régulières, privilégiez la proximité — le temps de déplacement sera facturé d'une manière ou d'une autre.
Comment utiliser ces facteurs dans votre négociation
Maintenant que vous connaissez les leviers, utilisez-les :
Checklist de négociation
- Faites un inventaire technique précis AVANT de demander des devis
- Demandez un SLA différencié (standard bureautique, premium serveurs)
- Exigez la liste exhaustive des exclusions du forfait
- Comparez les prix sur le même périmètre (pommes avec pommes)
- Négociez un prix fixe sur 12 mois incluant les mouvements utilisateurs
Un dernier point. Le prix le plus bas n'est jamais le meilleur choix. J'ai vu trop de PME prendre le moins-disant et le regretter 6 mois après. Le bon prix, c'est celui qui correspond à VOS besoins, avec un prestataire qui a les moyens de les tenir.
Samir Khelifi
22 ans dans l'IT parisien. A commencé technicien réseau chez un petit MSP du 10ème en 2001, grimpé jusqu'à directeur technique. A géré l'IT de 180+ PME parisiennes (cabinets d'avocats, agences, startups, médecins). Parti en 2019 après un burn-out : trop de clients mal conseillés par les commerciaux, trop de promesses intenables, trop de nuits à éteindre des incendies causés par des décisions commerciales débiles.
Article mis à jour le
Sources et références
- ACI Technology - Meilleures entreprises d'infogérance — Comparatif des prestataires IT
- IT for Business - Classement ESN 2024 — Analyse du marché des ESN en France
- Airmessoft - Guide prestataire informatique — Critères de choix d'un prestataire